Le jeudi de l’éloquence

Mais cet apparent consensus se fissure, et pas seulement sous l’effet de la lassitude ou du soupçon d’opportunisme. Aux États-Unis, les politiques de diversité, d’équité et d’inclusion (DE&I) ont connu un retournement net depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Pam Bondi, la nouvelle procureure générale, a annoncé qu’elle ordonnait à ses services d’agir contre les entreprises disposant de tels programmes, avec une portée extraterritoriale touchant notamment l’Europe. En mars 2025, plusieurs entreprises françaises ont reçu un questionnaire de l’ambassade américaine leur demandant si elles mettaient en place des politiques internes de lutte contre les discriminations, sous peine de perdre l’accès à certains marchés publics aux États-Unis.

 

Cette pression inédite a mis les directions RSE en alerte. Selon leur exposition aux marchés américains, certaines entreprises affirment « ne rien changer », tandis que d’autres adoptent une communication plus prudente, modulant leurs engagements selon les contextes géographiques.

Mais le débat dépasse la simple sphère économique. La légitimité même des politiques d’inclusion est parfois remise en question. Pour certains, elles sont perçues comme des importations culturelles anglo-saxonnes, difficilement conciliables avec l’universalisme républicain français. Ce qui fut jadis célébré comme une richesse, la diversité, est devenu parfois un point de friction révélateur d’un malaise plus large autour de l’identité collective et du rôle social de l’entreprise.

 

Pourtant, les chiffres continuent de plaider en faveur de l’inclusion et sur le terrain, les actions perdurent : mentorat, insertion, accompagnement des publics LGBTQia+ ou neurodivergents…

Mais la tension est là. L’entreprise peut-elle encore porter une ambition sociale sans devenir un acteur politique ? Jusqu’où doit-elle aller pour inclure les singularités sans fragmenter le collectif ? Et que reste-t-il du projet commun quand chacun devient un « cas à gérer » ?